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TEMPS FORTS C’est ça le drame ! Députés frustrés, états d’âme au sein de la majorité

La motion de mé-fiance du député de l’opposition, l ’ U N C M a y o , contre Matata Ponyo Mapon a révélé une chose. A savoir que la majorité a du vague à l’âme. Sinon, comment expliquer que plusieurs
députés proches du pou-voir aient appuyé, d’une manière ou d’une autre, un document destiné à descendre en flammes l’homme qui représente, pour l’instant du moins, la vision du Chef de l’Etat,et qui est chargé de la tra-duire dans les faits ?Qu’on s’en félicite ou qu’on le déplore, force est de se rendre à l’évidence. La
technocratie, désormais loin de faire rêver, a montré ses limites. Du moins est-ce l’avis de tous ceux qui
se sont associés, matériel-lement ou moralement, à la tentative de déstabilisation du chef du Gouvernement.
Mezza voce, les plus radi-caux au sein de la majorité n’hésitaient plus, pour justi-fier leur choix, de rappeler
que le 15 décembre 2012 devant les deux chambres réunies en Congrès, le Pré-sident de la République lui-même s’était publiquement interrogé sur le sens de ces performances macro-économiques qui ne se
traduisent jamais par des changements qualitatifs dans le vécu quotidien des Congolais.Une sentence qui avait dû flatter les derniers mobu-tistes de la scène politique congolaise. Qui ont vite fait de rappeler qu’en son temps le maréchal avait presque prophétisé en déclarant qu’on ne mange pas la rigueur. Il flagellait, en passant, un autre Pre-mier Ministre parmi les plus puissants qu’ait eu ce pays, lui aussi adepte de la rigueur, et de son nom Léon Kengo wa Dondo. Ce dernier y avait vu un désa-veu public de la politique inspirée par le Fonds Mo-nétaire International après avoir été violemment atta-qué par la frange populiste, ou jouisseuse, du comité central du MPR.Le drameOn n’en est certes pas là. Mais c’est, justement, en cela que réside le drame : qui peut dire aujourd’hui ce que veut réellement la classe politique congolaise ?
L’équation aurait dû être simple : ou on aime le Pre-mier Ministre et on le garde en recadrant sa mission au regard de nouveaux enjeux, ou on en a assez et on lui montre la porte de sortie. Les choses, heureu-sement ou malheureuse-ment, ne sont jamais aussi simples en République Dé-mocratique du Congo. Un pas en avant parce qu’on a beaucoup à dire d’un Chef de gouvernement accusé de tous les péchés d’Israël
et qu’on cherche à affaiblir pour mieux le manipuler. Un pas en arrière parce qu’on a jamais les ressour-ces morales nécessaires pour aller jusqu’au bout des initiatives annoncées tambour battant. Voilà l’ambiguïté. Voilà le drame de ces gestes qu’on n’a jamais le courage d’achever. Voilà l’incertitu-de d’une fonction qui aurait besoin d’une plus grande liberté de manœuvre et de la durée pour réussir, mais que des réalités politiques typiquement congolaises rattrapent et bloquent dans cette spirale dramatique bien de chez nous devenue le paradigme de la conduite des affaires de la nation.Certes, le Chef de l’Etat obligé de taper du poing sur la table pour ramener le calme dans les rangs et sauver son Premier Minis-tre réaffirme, du coup, son ascendant sur l’institution parlementaire dans un régime qui ne craint plus de flirter avec un certain présidentialisme. Certes, le Président de la République a confirmé son leadership sur sa famille politique et
indiqué, clairement, que c’est lui et lui seul le Chef de la majorité ; que c’est lui et lui seul qui avait opéré le
choix du Premier Ministre ; et que c’est lui, et lui seul, qui choisira l’heure et le scénario de sa sortie de scène…Il restait alors à savoir si cette approche constituait, politiquement, la solution la plus pertinente. S’il n’eut pas mieux valu éviter cer-tains errements, certains reniements qui ont fait mal à la majorité, quand bien
même les apprentis fron-deurs se sont empressés de rentrer dans les rangs. Premièrement : rien ne permet de croire que les états d’âme vont se cal-mer, que les pathétiques courbes rentrantes aux-quelles on a assisté n’ont pas été l’expression d’un véritable malaise, d’un trop plein d’hypocrisie ou, tout simplement, d’une attente non satisfaite en termes d’évaluation de la place et de l’apport de chacun dans la construction de la
maison commune. Deuxièmement, sauvé par le Président de la Ré-publique mais ouverte-ment contesté, le Chef du gouvernement n’a-t-il pas laissé son âme dans l’épreuve ? A-t-il toujours le cœur et la tête à l’ouvrage ? A-t-il encore l’audace et l’enthousiasme de sa mis-sion pour avoir été obligé, par nécessité plutôt que par conviction, de s’en remettre, pour sa survie, à l’intervention du Chef de l’Etat ? Matata Ponyo Mapon le sait : au moment où il s’ap-prête à fêter son premier anniversaire comme Chef du Gouvernement, dans un environnement politique désormais dominé par l’ac-cord cadre d’Addis-Abeba, les exigences du dialogue et donc de la cohésion na-tionale, la résurgence des irrédentismes provinciaux et les demandes d’une inflexion de sa politique de rigueur par sa propre ma-jorité, la seule volonté du Chef de l’Etat ne constitue pas un chèque en blanc. Il n’ignore pas que les ru-meurs sur sa volonté pré-sumée de rencontrer, dans un souci d’apaisement, certaines revendications catégorielles des députés, allant des émoluments à
la commande d’une nou-velle génération des jeeps Nissan, est une bombe à retardement susceptible de plomber les appels à la cohésion nationale par ces temps de crise non partagée… Déstabilisé !Voilà le débat. Qui souligne plus que jamais l’urgence et la nécessité d’un pas-sage en revue, au sein de la majorité, des troupes les plus aptes à mobiliser les masses, à faire passer le message de la solidarité et de la cohésion nationale.Le projet de la motion de censure a été tout, sauf un compliment à l’égard du Premier Ministre dont il chahutait la gestion, sans que le très paradoxal micro-cosme politico-médiatique congolais y trouve, dans un sens comme dans l’autre, matière à s’interroger sur sa propre responsabilité. Un procédé qui a rappelé, par certains aspects, celui utilisé en son temps contre l’ancien Premier Ministre Adolphe Muzito Fumunsi, taillé en pièces toujours par un député de l’oppo-sition, à l’époque le MLC Lucien Busa tout feux tout flammes. On se demande encore aujourd’hui si c’est la représentation nationale qui en était sortie grandie après toutes les rumeurs de marchandages autour de la motion.Alors question : très sé-rieusement, la majorité gagnait-elle, face à l’opi-nion, face à l’opposition et même à la rébellion du M23, en relayant – et donc en confirmant – les accusa-tions de mauvaise gestion dans le chef du Premier Ministre, de concussion,
de pratiques maffieuses et de délits d’initiés dans l’attribution des marchés ? Que gagnait la majorité en laissant croire que la représentation nationale n’exerce aucun contrôle sur l’exécutif, qu’elle a plutôt laissé faire dans une sorte de conspiration du silence? Une nouvelle fois, on s’est trompé de combat et c’est en cela que réside notre drame commun : jamais le courage des vraies ques-tions, jamais le courage
des vraies réponses.
BAPA